À ce qu’il paraît, les femmes seraient meilleures que les hommes en ultra-trail… Plus endurantes, plus résistantes aux douleurs musculaires et avec une meilleure gestion des courses, mais alors, pourquoi sont-elles si peu présentes ?

Après avoir fait ma petite enquête sur plusieurs semaines, j’ai listé plusieurs points. Chaque point pourrait être, à lui seul, un sujet en soi.

Le sentiment de culpabilité : se sentir coupable de prendre du temps pour soi et l'entraînement fait partie du temps que l’on prend pour soi.

Les raisons financières, familiales ou encore les contraintes domestiques.

L’insécurité : peur de s’entraîner seule en forêt par exemple.

L’âge : passer 45-50 ans, on ne se sent plus à la hauteur face aux plus jeunes

Le syndrome de la bonne élève : un perfectionnisme exacerbé qui touche essentiellement les femmes. Par exemple, chaque entraînement doit être fait parfaitement. Cela va même au-delà du trail.

La peur de la performance : penser qu’on ne peut pas faire partie d’un club car le niveau est trop haut, qu’il faut être une « athlète », être une « élite » pour y avoir accès. Ne pas se sentir assez bonne, penser qu’on n’est pas une vraie coureuse…

Mais, en y réfléchissant bien, qu’est-ce qu’une vraie coureuse? Qu’est-ce qu’une athlète ou une élite ?

En 2018, je me suis inscrite à l’Ultra Beast de Spartan Race à Stoneham. Une course à obstacles de 50k avec 60 obstacles. Lorsque je l’avais annoncée, je m’en souviens comme si c’était hier, j’étais au Mont St-Hilaire avec des amies. L’une d’elles avait réagi immédiatement : « C’est de la foooooliiiiie ! Tu n’es même pas une élite !! »Surprise et touchée, je lui ai répondu : « Et pourquoi pas? » Oui, pourquoi pas ? Pourquoi cette course ne pouvait-elle pas me convenir ? Qu’est-ce qui faisait que je ne pouvais pas y avoir accès ? Parce que je n’étais pas élite, je ne pouvais pas faire cette course ? Et si on est pas élite, ça veut dire qu’on est quoi ? Rien…?

J’ai donc participé à la course à l’encontre de mes amis et de ma famille. Parce que les participants abandonnaient tour à tour, j’ai fini par me retrouver 1ère de ma catégorie d’âge et 25e au classement général. Je n’aurais jamais pensé ça… Et ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres, car des réflexions mal placées sur mes capacités, les jugements et autres, j’en ai eu.

Je pense qu’il est temps que je me présente un peu. Je m’appelle Evane Michoux, j’ai 38 ans, je suis une Parisienne arrivée à Montréal en 2011. Je faisais du taekwondo depuis plusieurs années, c’était ma passion. En 2012, les migraines sont apparues et sont ensuite devenues chroniques en 2015. J’ai dû malheureusement arrêter le taekwondo. Les traitements ne fonctionnaient pas, c’était l’enfer. J’ai commencé à courir grâce à un ami et je me suis accrochée à cette discipline avec les courses à obstacles. Je me sentais vivante, je me sentais exister. Je marchais généralement la plupart du temps. En 2016, j’ai fait le marathon de Disney World et mon temps était de 6h30. Tout me prenait généralement le double du temps par rapport aux autres et bien sûr c’était douloureux niveau migraine… Mais ce n’était pas grave, j’étais tellement heureuse d’être sur une ligne de départ comme tout le monde, de participer, de profiter, de respirer, de vivre pendant cet instant, c’était magique ! Pour moi, chaque médaille a son importance, chaque chandail que je porte me rappelle ce que j’ai accompli. Je ne me rappelle pas du temps que j’ai fait, ni de mon classement, mais par contre, je me rappelle de la sensation et des émotions que j’avais. De la fierté que j’avais à m’inscrire, à me pousser comme je le pouvais et surtout au plaisir que j’avais eu à chaque fois.

Aujourd’hui, je suis coach pour les débutants au Club de course Bouge Bouge Verdun en plus d’être consultante et enseignante en réseaux sociaux. Mon plus gros objectif en tant que coach est de leur apprendre à avoir du plaisir à courir. Je souhaite qu’elles apprennent à s’amuser, à ne pas stresser par leur temps, par leur vitesse. Juste courir avec plaisir et profiter.

Je crois que chaque femme a, en elle, un sacré potentiel. Je suis asthmatique, migraineuse chronique, je n’ai jamais vraiment suivi un entraînement à la lettre et pourtant j’ai fait le 80k au Bromont Ultra en 2021 ainsi que le 65k de l’Ultra Trail Harricana (UTHC) un mois avant. Anne Mehudin, 52ans, a une fille, fait de l’arthrose et pourtant elle a fait le 160k de Bromont Ultra en 2021. Cécile Bertin, 51 ans, elle a 4 enfants, 41 marathons sur 7 continents à son actif et adore les ultras.

Le point commun entre ces 3 femmes ? Elles croient en elle. Il n’est pas nécessaire d’être une élite, d’être mince, d’être jeune, d’être sans enfant, ou encore d’être célibataire pour faire des ultra trails. Cependant, il est indispensable de croire en soi que ce soit en sport, professionnellement ou dans notre vie personnelle. Croyez en vous, soyez fière de vous et j’espère vous voir lors d’un ultra. Hé! Hé!